RDC-Démocratie« Joindre l’efficacité à la popularité : Insécurité, exécutif faible, crise alimentaire, une réforme du CNS s’impose à Fatshi »

Choix de la rédaction

Tribune de Melchisedek Karume « MK »

Alors que le rôle du Conseil National de Sécurité « CNS » place son patron dans la position de l’homme le mieux informé du pays, les observateurs s’inquiètent de l’image d’une RDC, ballotée entre agressions étrangères, mouvements rebelles, terroristes, pillages des ressources, corruption, catastrophes naturelles, violences communautaires, ingérences étrangères qu’elle offre aujourd’hui.

Entre popularité des acteurs politiques au pouvoir et efficacité du Gouvernement, plusieurs observateurs au regard de nos investigations, s’interrogent si la démocratie n’est-elle pas en train de devenir le mal congolais. Au-delà d’un exécutif émanation d’un parlement godillot, le Président de la République est appelé à consolider l’intelligence et l’expérience au sein de ses services pour garder la main dans la matérialisation de ses promesses de campagne.

La sortie officielle de l’Union Sacrée, plate-forme électorale pour la réélection du Président Tshisekedi à un second mandat, a démontré une fois de plus de la popularité du fils du sphynx dans la capitale, où les 80.000 places du stade ont été submergées. Les insuffisances des solutions aux problèmes du pays semblent néanmoins confirmer les craintes d’une franche de la population qui pensent que la démocratie congolaise tue l’efficacité en RDC.

Le gouvernement, émanation de la majorité parlementaire est le fruit des castings opérés par les patrons des partis politiques, motivés souvent par le souci de maintenir leur encrage à la base au péril de l’efficacité dans la conduite de l’Etat. Sans feuille de route réaliste, sans priorités opérationnelles, sans tableaux de bord pour évaluer leurs performances, les ministres viennent et partent du Gouvernement sans une sérieuse évaluation, d’indices de leurs performances et si ces dernières correspondent au deadline d’exécution fixé dans un tableau de bord. Les faibles performances des membres de l’exécutif sont rarement sanctionnées par des élus, plus souvent aux ordres des Chefs des partis politiques.

« Notre plus grande erreur, c’est que nous n’avions pas trouvé assez de temps pour transformer et formé nos propres cadres. On n’a pas besoin d’un millier de personnes pour transformer un pays. Non, on a besoin que de 3, 4, 10, 15 personnes avec des convictions, déterminées et résolues. Ai-je ces 15 personnes ? Probablement, 5, 6, 7 mais pas encore 15 » , avait déclaré en avril 2009 le prédécesseur de Félix Tshisekedi dans une interview accordée au journal américain « New-York Times ».

Plusieurs observateurs ont attribué ce déficit aux recruteurs, motivés le plus souvent par des intérêts autres que ceux de l’efficacité de l’action de l’Etat. Une fois nommées, les nouvelles recrues deviennent des vaches à lait des faiseurs des rois ou s’en mettent plein les poches pour financer leur propre ascensions au statut de chef de parti. Au regard de la situation du pays, pas favorable au progrès social et de la vision du peuple d’abord portée par Félix Tshisekedi après 37 ans d’opposition, il ne serait pas hasardeux de dire que le Président de la République regrette la qualité de son personnel politique.

Impuissance de l’Etat, le rôle du Conseil National de sécurité « CNS »

Sans préjudice des missions lui dévolues en vertu de l’article 2 de l’Ordonnance n°86-306 du 24 novembre 1986 qui a créé le Conseil National de sécurité « CNS », cette superstructure veille spécialement, sous l’autorité, du Président de la République, à la centralisation et à l’exploitation efficiente des documents et renseignements émanant des différents services spécialisés ad hoc, en l’occurrence : l’Agence Nationale des renseignements « ANR », les Renseignements Militaires, la Direction Générale des Migrations.

Le « CNS » veille également à la centralisation et à l’exploitation, à l’intention du Président de la République, des informations relatives à la sécurité du pays et émanant des départements et services publics membres du Conseil National de Sécurité ainsi que d’autres services de l’État à vocation de renseignements. Dans ce cadre, le Conseiller Spécial est chargé d’harmoniser les rapports entre les différents services de sécurité et de veiller à leur bonne marche. Les dispositions de l’article 1er du règlement d’ordre intérieur du « CNS » montrent que le Conseiller Spécial du Président Félix Tshisekedi, en matière de sécurité est détenteur des outils nécessaires à l’anticipation des crises ( insécurité dans l’Est, pillage des ressources, violences communautaires au Kwango, dans la Tshopo…) et enjeux d’avenir ( alimentaire, environnemental, énergétique…) et ainsi que ceux des profils d’animateurs réponses.

Si la loi sur le CNS est fruit des années dictatures, aujourd’hui en pleine démocratie, plus que jamais, le Président de la République a besoin d’un Conseil National de Sécurité efficace dans l’action publique face aux options partisanes des Chefs des partis politiques. Les caractères de son texte fondateur, érige le CNS en un sanctuaire d’intelligence et de loyauté au Président de la République. Bien que l’on prétende trouver la loyauté dans sa famille politique ou sa tribu, l’intelligence et l’expérience ne viennent pas toujours de ces deux cercles.

Le Conseil National de Sécurité comme on en trouve au service des chefs d’Etats à travers le monde est de ces services qui ont pour mission de parer à l’éventualité des faiblesses de l’exécutif, en l’occurrence en RDC, l’insécurité, le chômage de masse, le pillage des ressources, les mouvements terroristes etc. avec des analyses froides et pointues à soumettre au Président de la République.

Aux Etats Unis, le Président de la République peut s’appuyer, depuis 1947, sur une organisation qui, au sein de son Bureau exécutif, peut superviser la bonne marche des opérations en politique extérieure, et donner une cohérence à la cacophonie bureaucratique en matière d’affaires diplomatiques et stratégiques, cette organisation, le Conseil de Sécurité Nationale ou National Security Council (NSC), comme celle dirigée par Jean Claude Bukasa en RDC, constitue le centre du pouvoir à la Maison-Blanche. Le Conseiller Spécial du Chef de l’Etat au-delà de jouer au pompier, dans l’ombre, anticipe sur des faiblesses de l’exécutif, des intrigues et coups bas et les contradictions à venir contre le Président de la République, première institution du pays.

Situations exceptionnelles, mesures exceptionnelles

« Le Conseil National de Sécurité peut convoquer, pour audition, toute personne susceptible de lui apporter des éléments utiles à l’accomplissement de sa tâche. La convocation doit être signée par le Conseiller Spécial ou, par délégation de pouvoir, par son chef de Cabinet ou un chef de département de l’administration du Conseil National de Sécurité désigné à cet effet », ces textes de création confèrent au CNS un pouvoir qui n’a de limite que le magistrat suprême avec des départements de grands enjeux, pouvant faire le vis-à-vis du gouvernement, mais aussi la béquille d’un exécutif faible.

« Le renseignement c’est un métier de Seigneur »

Dans cette RDC où il est de plus en plus reproché à l’exécutif sa faiblesse, la volonté du « peuple d’abord » exigeant plus des résultats, la mission d’un accompagnement du Gouvernement par le Conseil National de Sécurité, coordonnateur de la communauté de renseignement congolais, ne sera pas superflu. Elaborer une feuille de route pour les membres du gouvernement, à qui les Chefs des partis ne demandent pas plus d’efficacité que celui de faire vivre les partis politiques.

Feuille de route, priorités opérationnelles, tableaux de bord et suivi, le « CNS » dans la logique d’un sanctuaire de l’intelligence et services du Chef de l’Etat, est outillé pour accompagner ceux des ministres dont la présence au gouvernement n’est justifiée que par leur popularité ou l’ambition personnelle de l’autorité morale du parti. Un tel pouvoir du Conseil National de Sécurité comme c’est le cas aujourd’hui, n’est peut être confié qu’aux seigneurs (Gentlemen), sinon on tombe dans la tracasserie et une nouvelle saignée du trésor public.

Le choix des animateurs de cette superstructure que représente le CNS répond logiquement aux exigences rigoureuses de moralité et de parcours individuel de chaque agent. L’état dans lequel se trouve la RDC aujourd’hui, exige une concentration d’intelligence, de professionnalisme, de loyauté et d’honnêteté autour du Chef de l’Etat.

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