« Le Parlement devient de plus en plus odieux et bête. Les ministres ont littéralement toutes leurs journées prises par leurs séances, ou de leurs commissions, la préparation des réponses qu’ils vont avoir à faire, la lecture des requêtes ou des injonctions les plus saugrenues du premier marchand de vins venu, que la politique a changé en député. […] Nous serons vainqueurs, dès que nous aurons balayé cette racaille, et il n’y a pas un Français qui n’en hurlerait de joie, les combattants en particulier. » Pour plusieurs observateurs de la vie politique congolaise, cette réflexion en 1916 du Général Charles de Gaule, héro de guerre Français, Président de la France libre et artisan de la constitution de la 5ième République, n’est pas loin de refléter la réalité parlementaire congolaise.
Voter la loi, représenter le peuple et contrôler l’action gouvernementale sont là les fonctions essentielles prévues par les dispositions constitutionnelles de la République démocratique du Congo. La fonction de contrôle parlementaire se manifeste dans le suivi de la mise en œuvre effective des politiques publiques par l’Exécutif afin de répondre aux aspirations du peuple dont il est le représentant.
Aujourd’hui malheureusement, de plus en plus des congolais font un constat amer de l’activité parlementaire qui ne profite pas à l’intérêt général. « Ils promettent en période de campagne, de défendre le peuple mais seul leurs intérêts comptent une fois au palais du peuple », déclare à notre journal un habitant d’un quartier de la commune de Ngaliema, dont les maisons n’en finissent plus de disparaitre sous les érosions.
La République démocratique du Congo qui a fait son comeback en démocratie avec les élections générales de 2006 après plus de 40 ans d’arrêt, peine à voir sa jeune démocratie prendre forme. Quand il est question de défendre la cause des élus, la machine se met en branle rapidement, les présumés coupables sont convoqués, interpellés, les députés mobilisés et en cas d’incompatibilité avec les desideratas des honorables parlementaires, la mise à mort est actionnée sans autre forme de procès.
Jean marc Kabund, Premier Vice-Président déchu de l’assemblée nationale a expérimenté la puissance de feu de l’institution dont il est membre, lors de sa déchéance, après avoir révélé dans les ondes de la radio top Congo que l’organisation du congrès souhaité par le Président du Sénat, Alexis Thambwe Mwamba pour régulariser l’état d’urgence, couterait 7 millions des dollars américains au trésor public. Les affirmations de Kabund auraient irrité son collègue Jean-Jacques Mamba, député du Mouvement pour la libération du Congo de jean pierre Bemba qui va initier la pétition qui conduira à la déchéance de Kabund.
« Pétition contre » c’est le mot de passe maintenant au palais du peuple, affirme à notre journal un député national condamnant la banalisation de ce procédé au profit des intérêts personnels et égoïstes. « Vous êtes ministre, mandataire vous ne décrochez pas au coup de fil du prestigieux citoyen du palais du peuple, une commission se met en place pour vous entendre sur des faits fantaisistes et la menace d’une pétition plane sur vos fonctions » ,il confie à notre rédaction.
« C’est une question parlementaire, notre ami Jean marc Kabund pouvait très bien s’en sortir s’il avait eu un comportement adéquat. Ce n’est pas pour ça que nous avons créé le FCC-CACH. Nous le regrettons mais on ne pouvait plus contrôler les membres du parlement qui se sont senti ridiculisés, menacés et qui ont réagi un peu de manière corporatiste », avait déclaré le député Lambert Mende ancien porte-parole du gouvernement Kabila.
Si pour Lambert Mende le comportement adéquat de Kabund était des excuses à ses collègues cela est loin d’être l’avis de plusieurs autres députés, citoyens prestigieux du palais du peuple, pour qui une pétition serait une opportunité à compter les billets verts de l’oncle Sam, affirme un autre observateur privilégié de la vie parlementaire de la RDC.
Des sources concordantes nous renseignent que, la pétition contre Jean marc Kabund, numéro deux de l’assemblée nationale, aurait bénéficié financièrement à plusieurs élus. « Dictature du parlement » Jean François Copé avait dénoncé cela au palais bourbon en 2009, alors qu’il était le patron du groupe parlementaire UMP, en expliquant que cela ralentissait les reformes. Bien qu’il ait essuyer des critiques de la part des députés socialistes, la réflexion de jean François Copé a toute sa place en République démocratique du Congo où au-delà de la légitimité des actions des contrôles parlementaires se pose également une question des valeurs dans l’exécution des fonctions parlementaires comme prévu dans les textes règlementaires.
« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir » ,disait le baron de Montesquieu. Si l’on s’en remet à Montesquieu, inventeur du principe, la séparation a pour principal mérite de faire que le pouvoir de l’un limite le pouvoir de l’autre. Rien donc de plus normal que le pouvoir législatif rappelle sans cesse au pouvoir exécutif qu’il existe, mieux serait encore pour le cas congolais, que ce rappel cadre avec sa mission qui est celle de défendre les intérêts des citoyens, l’intérêt général contre les abus du monopole étatique.
Quand on fait immersion dans la vie politique congolaise, précisément dans les activités parlementaires, on se rend compte que le parlement sur-occupe l’exécutif avec des questions souvent secondaires, l’empêchant ainsi de gouverner correctement, certains élus aveuglés par des intérêts particuliers au point d’en perdre de vue l’intérêt national, n’hésitent même plus à vouloir plonger des dignes serviteurs de la République dans les caniveaux des intérêts égoïstes. « Alors que nous étions au cabinet, à l’époque où la paie passée entre les mains de nos comptables, il est arrivé plus d’une fois qu’elle soit détournée au profit des députés qui menaçaient de faire tomber le gouvernement par une motion » déclare un ancien conseiller à la Vice-primature du dernier gouvernement Muzitu sous Joseph Kabila. « La bancarisation doit faire regretter malheureusement aujourd’hui à certains parlementaires des pratiques insensées du passé » rajoute-t-il.
Cela est aujourd’hui un secret de polichinelle que les pétitions, les motions et autres sont parfois conçus pour les intérêts pécuniaires de certains députés qui salissent la réputation de leurs collègues droits dans leurs bottes au service de la Nation.
Autant les députés condamnent la dictature des juges autant ils doivent prêcher par l’exemple en étant réellement au service de la Nation et en protégeant ceux qui servent réellement la cause de la démocratie et des citoyens.
Les Défis Congolais